Archive for février, 2022

Les prix des consommations énergétiques des ménages : une perspective de long terme

lundi, février 21st, 2022

Cette analyse de l’Institut pour un Développement Durable vise à mettre en perspective les évolutions de long terme des prix des consommations énergétiques des ménages.

Avec l’aide précieuse de StatBel, l’IDD a réussi à reconstituer

  • quatre séries de prix à partir de 1920 : charbon, électricité, gaz et indice des prix à la consommation (IPC)
  • deux séries de prix à partir de 1970 : carburants routiers et mazout de chauffage
  • l’évolution du revenu disponible moyen (à prix courants) à partir de 1950

et à estimer l’évolution des poids respectifs des consommations énergétiques pour la période 1970-2022.

C’est la période 1970-2022 qui permet l’analyse la plus dense, puisqu’on dispose de toutes les informations utiles. Voici quelques évolutions essentielles :

Le graphique ci-après montre que, tout au long de la période 1970 et 2022 (janvier), l’évolution de moyenne des prix énergétiques relativement à l’évolution du revenu disponible s’est toujours située en-dessous du niveau de 1970, à l’exception du début des années 1980. Le minimum se situe en 1995 (environ à mi-chemin du parcours) ; depuis lors les prix énergétiques évoluent – en moyenne – tendanciellement plus vite que le revenu disponible ; en 2022 le niveau est encore quelque peu inférieur à la référence de 1970 (indice 96 versus indice 100).

On peut présenter les choses autrement, en calculant l’évolution du pouvoir d’achat énergétique. Le graphique ci-après montre que, tout au long de la période 1970-2022, le pouvoir d’achat énergétique a été supérieur à celui de 1970, à l’exception du gaz en 1982-1985 et en 2022 et, plus faiblement, des carburants routiers au début des années 80 et en 2012. Par exemple, en 2007, un revenu moyen permettait de dépenser 2,6 fois plus pour l’électricité qu’en 1970 ; depuis lors le pouvoir d’achat électrique est en net recul. Le pouvoir d’achat du gaz est au début de 2022 en retrait par rapport à 1970.

La note (disponible ici) examine plus avant les évolutions absolues et relatives des prix énergétiques, y compris, là où c’est possible, pour la période 1920-2022. NB : La note est une version corrigée – les corrections sont surlignées en magenta.

J’ai bien conscience qu’il s’agit d’une première étape ; cette analyse ouvre la porte à d’autres questionnements : quel est la part de la dynamique des prix attribuable aux évolutions de la fiscalité et d’autres prélèvements, comment ces évolutions des prix ont-elles joué dans les comportements de consommation, etc., etc. ?

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Ce travail a-t-il du sens ? Modestement, je pense que oui.

Il y a d’abord un intérêt scientifique. Ce genre de travaux peut intéresser, par exemple, des historiens ; mais il peut aussi éclairer les économistes : les évolutions relatives des prix énergétiques sont étroitement articulées à la dynamique de la croissance économique.

Il y a deux préoccupations plus immédiates éclairées par cette analyse :

  1. La nécessité d’adapter les mécanismes d’aides à chaque type d’énergie, afin d’assurer une équité entre ménages ; en matière de chauffage en particulier, on voit bien que les prix du mazout (qui est souvent un choix par défaut) et du gaz n’évoluent pas de la même manière.
  2. L’indispensable réflexion sur l’évolution des prix après la probable décrue des tensions ; un scénario comme dans la seconde moitié des années 1980 – on a laissé filer les prix – ou un choix de prix élevés pour construire une transition énergétique à la hauteur des enjeux climatiques ? Permettez-moi de penser, aujourd’hui en tout cas, que la première option est la plus probable.

Le lecteur intéressé pourra accéder à la banque de données ici.

Philippe Defeyt

 

Le développement durable, un objectif monétaire ?

vendredi, février 11th, 2022

L’Institut pour un Développement Durable a le plaisir de publier une réflexion sur une question qui fait l’objet de vifs débats et de nombreuses expérimentations ou propositions : construire un cadre monétaire compatible avec un développement durable.

Jézabel Couppey-Soubeyran et Pierre Delandre nous livrent ici, dans un langage accessible, une analyse historique des évolutions monétaires qui intègre des phénomènes récents comme la crise financière de 2008, l’élargissement quantitatif, les cryptomonnaies ou les monnaies locales.

Leur réflexion débouche sur la conclusion que « notre architecture monétaire actuelle nous retient dans l’évolution de notre civilisation, alors qu’elle pourrait être au contraire un puissant levier de changement » dans le sens du développement durable.

La réflexion qu’ils proposent, stimulante, se conclut par la proposition de la monnaie-don ou monnaie volontaire, complémentairement à la monnaie bancaire classique.

Voir la note ici.

Verdissement de la politique agricole : opposer la viabilité économique et la durabilité environnementale passe à côté du débat principal

lundi, février 7th, 2022

L’Institut pour un Développement Durable a le plaisir de publier une réflexion d’Olivier Lefebvre sur le verdissement de la politique agricole.

L’opposition apparaît frontale entre viabilité économique et préservation de l’environnement. Les échanges sont durs, chargés d’émotions bien compréhensibles entre ceux qui défendent la planète pour le bien de leurs enfants, et ceux qui se débattent au quotidien pour se maintenir à flot.

Toutefois en y regardant de plus près, il semble qu’opposer la viabilité économique et la durabilité environnementale passe à côté du débat principal. Dire qu’il faut changer la politique agricole pour la verdir, n’est que partiellement vrai. Il faut la changer parce qu’elle est globalement dans une impasse.

Plutôt que d’opposer économie et environnement, de manière assez stérile et en partie non fondée, il y aurait lieu de construire ensemble une véritable vision stratégique à l’échelle de la Région dans le contexte européen en évolution, en vue d’une agriculture durable et résiliente dans ses aspects économiques, sociaux, environnementaux et alimentaires.

Seule une approche holistique de la fourche à la fourchette, peut produire une telle vision qui soit à la fois robuste et inclusive. Il s’agit d’un changement de paradigme au moins aussi important que celui qui a fait passer l’agriculture paysanne à la révolution verte au milieu du 20ième siècle. Ce changement de paradigme à l’échelle des fermes, mais aussi des filières de transformation et de commercialisation, du développement des circuits courts… va demander un accompagnement important des acteurs, et, à l’instar d’autres secteurs, une réorientation majeure des investissements et des qualifications.

Voir la note ici.