Les prix des consommations énergétiques des ménages : une perspective de long terme

Cette analyse de l’Institut pour un Développement Durable vise à mettre en perspective les évolutions de long terme des prix des consommations énergétiques des ménages.

Avec l’aide précieuse de StatBel, l’IDD a réussi à reconstituer

  • quatre séries de prix à partir de 1920 : charbon, électricité, gaz et indice des prix à la consommation (IPC)
  • deux séries de prix à partir de 1970 : carburants routiers et mazout de chauffage
  • l’évolution du revenu disponible moyen (à prix courants) à partir de 1950

et à estimer l’évolution des poids respectifs des consommations énergétiques pour la période 1970-2022.

C’est la période 1970-2022 qui permet l’analyse la plus dense, puisqu’on dispose de toutes les informations utiles. Voici quelques évolutions essentielles :

Le graphique ci-après montre que, tout au long de la période 1970 et 2022 (janvier), l’évolution de moyenne des prix énergétiques relativement à l’évolution du revenu disponible s’est toujours située en-dessous du niveau de 1970, à l’exception du début des années 1980. Le minimum se situe en 1995 (environ à mi-chemin du parcours) ; depuis lors les prix énergétiques évoluent – en moyenne – tendanciellement plus vite que le revenu disponible ; en 2022 le niveau est encore quelque peu inférieur à la référence de 1970 (indice 96 versus indice 100).

On peut présenter les choses autrement, en calculant l’évolution du pouvoir d’achat énergétique. Le graphique ci-après montre que, tout au long de la période 1970-2022, le pouvoir d’achat énergétique a été supérieur à celui de 1970, à l’exception du gaz en 1982-1985 et en 2022 et, plus faiblement, des carburants routiers au début des années 80 et en 2012. Par exemple, en 2007, un revenu moyen permettait de dépenser 2,6 fois plus pour l’électricité qu’en 1970 ; depuis lors le pouvoir d’achat électrique est en net recul. Le pouvoir d’achat du gaz est au début de 2022 en retrait par rapport à 1970.

La note (disponible ici) examine plus avant les évolutions absolues et relatives des prix énergétiques, y compris, là où c’est possible, pour la période 1920-2022. NB : La note est une version corrigée – les corrections sont surlignées en magenta.

J’ai bien conscience qu’il s’agit d’une première étape ; cette analyse ouvre la porte à d’autres questionnements : quel est la part de la dynamique des prix attribuable aux évolutions de la fiscalité et d’autres prélèvements, comment ces évolutions des prix ont-elles joué dans les comportements de consommation, etc., etc. ?

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Ce travail a-t-il du sens ? Modestement, je pense que oui.

Il y a d’abord un intérêt scientifique. Ce genre de travaux peut intéresser, par exemple, des historiens ; mais il peut aussi éclairer les économistes : les évolutions relatives des prix énergétiques sont étroitement articulées à la dynamique de la croissance économique.

Il y a deux préoccupations plus immédiates éclairées par cette analyse :

  1. La nécessité d’adapter les mécanismes d’aides à chaque type d’énergie, afin d’assurer une équité entre ménages ; en matière de chauffage en particulier, on voit bien que les prix du mazout (qui est souvent un choix par défaut) et du gaz n’évoluent pas de la même manière.
  2. L’indispensable réflexion sur l’évolution des prix après la probable décrue des tensions ; un scénario comme dans la seconde moitié des années 1980 – on a laissé filer les prix – ou un choix de prix élevés pour construire une transition énergétique à la hauteur des enjeux climatiques ? Permettez-moi de penser, aujourd’hui en tout cas, que la première option est la plus probable.

Le lecteur intéressé pourra accéder à la banque de données ici.

Philippe Defeyt

 

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