Archive for décembre, 2020

Ajuster automatiquement les cotisations des indépendants aux fluctuations de leur revenu : une réforme structurelle au service des indépendants et de la relance

lundi, décembre 28th, 2020

En principe, depuis la réforme de 2015, les indépendants paient leurs cotisations sur base des revenus réels de la période en cours.

Le problème : les revenus sont connus avec retard. Il a donc fallu organiser un système de cotisations provisoires. Il y a donc, le moment venu, une régularisation basée sur l’écart entre les cotisations dues et celles déjà payées, pouvant aboutir sur un supplément à payer ou un remboursement à recevoir.

Depuis 2015, le législateur a donc prévu la possibilité, dans l’attente de la communication des revenus définitifs, de demander à payer des cotisations sociales réduites si l’indépendant estime que les revenus professionnels pour l’année en cours seront inférieurs à ceux sur la base desquels sont calculées les cotisations. Inversement, mais là les procédures sont plus fluides, l’indépendant qui estime que son revenu sera plus élevé que le revenu de référence proposé par la caisse pourra payer des cotisations plus importantes, soit sur base d’un accord, soit spontanément.

Même s’il constitue un progrès par rapport à la situation avant 2015, le système actuel de fixation des cotisations sociales n’est pas, loin de là, un optimum : la charge administrative, les difficultés objectives d’estimer le revenu pour l’année en cours, le système de planchers qui s’appliquent pour le calcul des cotisations réduites, les nombreux seuils concernant les indépendants en début d’activité, les différences de traitement entre les catégories d’indépendants sont les limites les plus importantes du système actuel. Il présente aussi le risque suivant : « Un indépendant qui demande une exonération ou une réduction des cotisations provisoires encourra une majoration s’il s’avère qu’il a payé trop peu sur la base des revenus définitifs de cette année de cotisations. »

La réforme proposée dans la note jointe vise à répondre à ces difficultés, dans un système cohérent, financièrement et juridiquement sécurisant, facile d’application, valable pour toutes les catégories d’indépendants.

La proposition concrète : Chaque trimestre, on établit une déclaration de revenu provisoire basée sur la valeur ajoutée (calculée à partir du chiffre d’affaires et des dépenses courantes de la déclaration TVA), diminuée des coûts salariaux, des loyers, des amortissements (fiscaux) et, s’ils sont déductibles à l’IPP, des intérêts des emprunts. C’est sur base de ce revenu provisoire que sont calculés les cotisations sociales et les versements anticipés.

Les avantages d’un tel système sont évidents :

  • les cotisations dépendent strictement et uniquement du revenu du trimestre précédent et donc : pas de revenu, pas de cotisations ; par là même la gestion de la trésorerie s’en trouve allégée
  • il assure une plus grande sécurité financière et juridique aux indépendants : l’indépendant dispose des informations pour calculer son revenu (il ne doit pas l’estimer) et si les cotisations et versements anticipés sont calculés sur base de ce revenu il n’y a aucun risque de pénalité
  • il réduit considérablement les ajustements à la hausse comme à la baisse des cotisations et impôts une fois les revenus définitifs connus
  • le système allège la charge administrative globale (caisses et indépendants)
  • il met tous les indépendants sur pied d’égalité
  • enfin, les données du revenu provisoire constitueraient un tableau de bord réaliste pour les indépendants qui manquent d’expérience et/ou de rigueur et, par là même, permettraient un accompagnement plus en amont des indépendants en difficultés et un suivi proactif des indépendants en retard de cotisations et/ou de versements anticipés.

Est-ce le moment de penser à des réformes structurelles diront certains ? Oui en l’occurrence, parce que cette réforme pourrait constituer une mesure du futur plan de relance socio-économique en soutenant les indépendants qui connaîtront encore des moments difficiles en 2021.

Plus dans la note accessible via ce lien.

L’emploi des peu qualifié.e.s en Wallonie

lundi, décembre 14th, 2020

NB : Cette Brève reprend l’essentiel d’un exposé fait dans le cadre d’un webinaire organisé par l’Instance de bassin Emploi-Formation-Enseignement de Huy-Waremme et consacré au thème « Quelles perspectives d’emploi pour les publics peu qualifiés dans un monde post Covid? »

La Brève n°51 de l’Institut pour un Développement Durable explore la question des peu qualifié.e.s.

Elle examine diverses statistiques : pourcentage de peu qualifié.e.s dans la population totale, dans la population active, dans l’emploi et dans le chômage, propose des comparaisons interrégionales et examine plus en détail les secteurs économiques qui concentrent l’essentiel de l’emploi salarié des peu qualifié.e.s.

Quelques conclusions et orientations :

  • En matière de niveau d’éducation et de mise à l’emploi des personnes peu qualifiées, le bilan wallon n’est pas brillant ; comment peut-on encore avoir près de 20% des 30-34 ans qui ne sont pas allé.e.s plus loin que le secondaire inférieur ? ; comment le pourcentage des peu qualifié.e.s dans l’emploi total reste-t-il nettement inférieur à leur part dans la population ?
  • On ne peu plus se contenter de l’approximation « niveau d’études » pour analyser et améliorer l’insertion des peu qualifié.e.s.
  • Des développements statistiques sont nécessaires (ex : mieux connaître la répartition sectorielle de ceux/celles qui passent par l’intérim).
  • Les secteurs qui occupent des peu qualifié.e.s sont plus nombreux et diversifiés que ceux auxquels on pense le plus souvent, à savoir : commerce, nettoyage, restaurants pour l’essentiel.
  • Dans chaque secteur il y a des dynamiques à l’œuvre qu’il faut essayer d’anticiper ; illustration : les administrations publiques sont en Wallonie le plus gros employeur de peu qualifié.e.s ; or les règles d’embauche actuelles signifient, de facto, la fin à terme des emplois de peu qualifié.e.s dans ce secteur.
  • L’étude de ces dynamiques spécifiques doit s’appuyer sur : 1° les dynamiques d’âge (plus ou moins de sorties de l’emploi dans les années à venir) ; 2° les compétences professionnelles acquises en cours de carrière (ex : administration publique, construction…) ; la problématique des formations et acquis (éventuellement validés) des peu qualifié.e.s à l’emploi est peu documentée : des actions volontaristes sont ici nécessaires.
  • Que l’on passe par les Territoires Zéro Chômeurs de Longue Durée ou par des formules plus classiques (ex : subsides à l’emploi comme dans les titres-services), il n’y aura pas de free lunch si on veut améliorer le niveau de participation des peu qualifié.e.s ; solvabiliser certaines activités potentielles susceptibles d’accueillir des peu qualifié.e.s nécessitera des moyens budgétaires supplémentaires.
  • Mais, bonne nouvelle, il y a des perspectives stimulantes pour embaucher des peu qualifié.e.s : l’économie circulaire (en particulier dans la construction), la transition écologique, les aides logistiques aux personnes âgées, les activités de loisir-tourisme relocalisées, etc. Attention : les innovations technologiques sont aussi présentes dans ces activités (ex : tri des déchets, domotique chez les personnes âgées…).
  • Il ne faut pas non plus oublier les conditions de vie des peu qualifié.e.s. qui peuvent rendre leur pleine participation plus compliquée.
  • Ne faut-il pas développer plus de métiers « intermédiaires » pour augmenter les possibilités d’insertion ?
  • Les peu qualifié.e.s sont souvent mal payé.e.s ; leur pouvoir d’achat doit être amélioré ; deux formules : l’augmentation du salaire minimum (peu crédible dans les circonstances socio-économiques et politiques de l’heure) ou l’allègement de l’IPP ; mais les caractéristiques actuelles du précompte professionnel font que seule la voie de crédits d’impôts permettrait d’améliorer réellement le net de nombreux.ses peu qualifié.e.s.
  • Enfin, ne faut-il, comme le suggère Thierry Dock, plaider « Pour un abandon du principe d’inemployabilité » ?

Plus dans la note jointe.